Cet article est un extrait de la note documentaire, très riche en références, sur « L’autodétermination des personnes en situation de handicap » qui fait un état des lieux sur la législation, les outils de mises en œuvre et les initiatives inspirantes.
Elle a été réalisée par Emilie Bec, relue par Cathy Casu, Claire Garcia, Christel Andrieu, au CREAI-ORS Occitanie en 2023. Cet extrait fournit des éléments de cadrage et propose des définitions, présente les différents concepts associés et modèles théorisés. Pour lire la suite, la note est disponible en ligne dans son intégralité.
L’autodétermination est un concept qui possède une histoire riche. L’origine du terme puise son sens au cœur du domaine politique. Paru en 1683 dans l’Oxford English Dictionary, la plus vieille utilisation du terme se réfère à la détermination de la pensée ou de la volonté d’une personne envers un objet. En 1911, une nouvelle définition fait état d’une action d’une personne à décider de sa propre forme de gouvernement. Appliqué dans les perspectives de demande d’indépendance des peuples colonisés, le terme d’autodétermination exprime alors leur droit au retour à l’indépendance, à l’autonomie et leur capacité à s’autogouverner.
L’application du terme aux personnes en situation de handicap date des années 70 avec le Mouvement de la vie autonome qui définit l’autodétermination comme l’un des besoins psychologiques favorisant l’épanouissement de l’individu, au même titre que le besoin de compétence et de relations sociales.
Depuis l’utilisation du terme a évolué et s’est traduite par l’élaboration d’une dizaine de définitions. Parmi elles, la HAS et l’Anesm, dans les différentes recommandations de bonnes pratiques professionnelles, la définissent comme :
Outre ces définitions, quatre modèles conceptuels prédominants ont été théorisés. Ces quatre modèles se distinguent, notamment par leur perspective et leur complémentarité à étudier, décrire, comprendre et promouvoir l’autodétermination de manière multidimensionnelle.
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Le premier modèle a été développé dans les années 80, par deux psychologues américains, Edward Deci et Richard Ryan. Leur théorie de l’autodétermination (TAD) a renversé la croyance dominante selon laquelle le meilleur moyen d’inciter les êtres humains - Lire la suite
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Le second modèle a été développé par les travaux de Brian Abery de l’Université du Minnesota et Roger Stancliffe de l’Université de Sydney. Il s’agit du modèle tripartite écologique de l’autodétermination. Il se distingue des autres modèles qui sont surtout centrés sur la notion de contrôle personnel et considèrent que les personnes qui exercent un plus grand pouvoir sur leur vie et prennent plus de décisions sont plus autodéterminées - Lire la suite
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Le troisième modèle, le modèle fonctionnel d’autodétermination, a été développé dans les années 90 par Michael Lee Wehmeyer, professeur d'éducation spécialisée aux États-Unis. Il définit le comportement autodéterminé comme les attitudes et les capacités requises pour agir en tant qu’agent causal principal dans sa vie et pour faire des choix concernant ses actions sans influence ou interférence externe indue. - Lire la suite
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Le quatrième modèle est la théorie de l’agentivité causale (TAC) développée par Michael Lee Wehmeyer, Karrie Shogren et Susan Palmer en 2017. Cette théorie trouve son origine dans le modèle fonctionnel de l’autodétermination et partage beaucoup avec les définitions et les conceptualisations de Wehmeyer mais elle a évolué vers une orientation plus axée sur l’action. - Lire la suite
Le concept autodétermination est inhérent à la notion de liberté et à l’accès aux droits. Pour les personnes accueillies en établissement social et médico-social la notion de liberté se confronte à celle de pouvoir, dans le sens où les personnes accompagnées voient leur amplitude de liberté maitrisée par les professionnels, les familles, qui ont un pouvoir décisionnaire quant à l’évolution et à différents aspects de la vie en institution.
L’autodétermination est un relatif équilibre entre dimension personnelle (envie, besoin, désir) et dimensions contextuelle et environnementale. Il existe au moins deux manières d’agir pour favoriser l’autodétermination et ainsi promouvoir une société inclusive.
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Le premier levier a attrait à la dimension personnelle. Pour pouvoir s’autodéterminer, la connaissance de soi est fondamentale, sinon il est difficile de revendiquer et imposer des choix. Il convient dès lors d’aider la personne à mieux se connaître et de pouvoir mieux dire. Le travail de l’accompagnant doit se dédouaner des limitations environnementales. Il faut alors, par exemple, trouver des alternatives à une communication si les personnes n’ont pas accès à la parole et explorer les possibles afin de matérialiser une perception irréelle et impalpable.
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Le second levier repose sur l’adaptation de l’environnement. Les attendus doivent s’adapter à la personne et l’environnement choisi avec soin afin de favoriser l’expression des personnes au maximum. Cette approche ne peut être formative ou normative mais individualisée.
L’autodétermination se distingue de l’autonomie et ne se résume pas simplement à l’indépendance, ni à la capacité à faire des choix. Il s’agit d’un apprentissage à pouvoir gérer sa vie tant dans l’habitat, le travail, la santé, les loisirs, etc., qui se fait dès le plus jeune âge mais aussi au long de la vie, tant en famille, que dans tous les contextes de vie.
Néanmoins, cet apprentissage se construit dans l’interaction nécessitant que l’entourage proche (famille, professionnels) soit aussi capable de s’autodéterminer et se montrer “autrement capable”, pour soutenir la personne en situation de handicap.
L’autodétermination est une pensée opérationnelle et pas seulement idéologique, son ambition est de permettre le développement des habilités individuelles en minimisant les contraintes environnementales et contextuelles. Il s’agit de passer de la soumission à la coopération afin de construire conjointement un projet individuel et personnel.