Troubles alimentaires : favoriser une ambiance sereine au cours des repas

Troubles alimentaires : favoriser une ambiance sereine au cours des repas
16.08.2021 Trucs et astuces Temps de lecture : 7 min

Le livre de Lucie Briatte et Lauriane Barreau-Drouin publié chez Tom Pousse traite du trouble alimentaire pédiatrique. En voici un extrait avec des pistes d’accompagnement d’un enfant présentant un trouble alimentaire…

L’une des pistes d’accompagnement d’un enfant présentant un trouble alimentaire pédiatrique est de favoriser une ambiance sereine au cours des repas. Voici quelques conseils publiés dans ce livre…

 

Les repas sont des temps très importants dans notre vie quotidienne

Temps forts de la vie familiale comme de la vie sociale de l’enfant, les repas ponctuent la journée et perpétuent des traditions ancrées culturellement (goûters d’anniversaire, repas du réveillon…).

En France, ils se font en général à heure fixe, trois à quatre fois par jour. L’ordre des aliments est codifié et une fois l’enfant en âge d’entrer à l’école, on estime qu’il doit être autonome et savoir utiliser des couverts.

À la volonté de répondre aux modèles familiaux et culturels s’ajoute de plus en plus l’impératif de « manger sain », ce qui peut être encore davantage culpabilisant pour des parents d’enfants présentant un trouble alimentaire pédiatrique qui n’arriveraient pas à suivre cette démarche.

Pourquoi changer ses habitudes avant les repas quand les repas se passent « mal » ?

Les parents d’un enfant présentant un trouble alimentaire pédiatrique ont généralement instauré des habitudes familiales dans une visée éducative et souvent héritées de leur propre éducation. C’est en cela qu’ils ont un rôle important à jouer dans la construction de l’environnement autour des repas.

Il est important d’appréhender certains des changements préconisés comme des adaptations temporaires – mais cependant nécessaires – en dehors de certains profils d’enfants pour lesquels ces modifications ont vocation à perdurer plus longtemps (par exemple des enfants qui présenteraient un trouble du spectre autistique ou qui seraient en situation de polyhandicap).

Les conseils qui suivent pour favoriser une ambiance agréable au cours des repas sont bien sûr à adapter à la situation de chaque famille.

 

Conseil sur la présentation et le déroulé des repas

  • Faire participer l’enfant à la préparation des repas, afin de l’aider à anticiper ces temps, à favoriser toutes les expériences sensorielles des aliments et à développer son répertoire alimentaire en verbalisant les actions réalisées. Quand nous faisons fondre du chocolat par exemple, notre cerveau comme notre bouche « se mettent en éveil » !
  • Préférer la présentation des aliments dans différents récipients. Recourir à des aliments colorés ou à une présentation originale (« pizza-bonhomme », visage fait à partir de légumes ou de fruits…) contribue à rendre le contenu de l’assiette attrayant.
  • Il vaut mieux commencer par proposer à manger de petites quantités (servir d’emblée de grosses quantités peut être décourageant pour un enfant présentant des troubles alimentaires pédiatriques).
  • Disposer l’entrée, le plat et le dessert au centre de la table, ce qui permet à l’enfant de se servir lui-même et de ne pas être soumis à l’ordre classiquement imposé.
  • Mettre en place des rituels marquant le début et la fin des repas (clochette à agiter, dessin ou pictogramme à accrocher), de préférence manipulables par l’enfant lui-même.
  • Afficher le temps total consacré au repas et visualiser au fur et à mesure le temps écoulé est rassurant pour certains enfants, notamment ceux qui ne sont pas encore en âge de savoir lire l’heure. Cela permet que se faire avec un sablier ou un Time Timer@ (minuterie visuelle). Il est important d’avoir conscience que les représentations temporelles d’un enfant sont très éloignées de celle d’un adulte.
  • Éviter, sinon modérer, les activités distractives pendant le repas : la télévision ou la radio sont à éteindre, car elles détournent complètement l’enfant de ses sensations alimentaires. L’utilisation de jeux ou de livres pendant les repas (par exemple entre l’entrée et le plat) est à faire à bon escient, cest-à-dire en les intégrant à une stratégie pour faciliter la prise alimentaire (le principe du « jeu-récompense » par exemple).

 

Conseils sur l’attitude à avoir face à un enfant qui présente des difficultés alimentaires

  • Ne pas chercher à cacher à l’enfant qu’on lui fait goûter quelque chose de nouveau, au risque de le faire douter de la confiance qu’il peut placer en la personne qui l’accompagne le temps du repas.
  • Veiller à ne pas s’arrêter sur une expérience désagréable pendant le repas : si l’enfant refuse de manger avec ses couverts par exemple, lui proposer de manger autrement : en utilisant un cure-dents, en associant deux aliments ensemble (un « aliment-copain » et un nouvel aliment), en trempant l’aliment dans une sauce… voire en lui donnant à manger, afin de ne pas rester sur un refus alimentaire.
  • Ne pas réprimander le bébé ou le jeune enfant quand celui-ci refuse de goûter ou de manger quelque chose : rester sur des commentaires les plus « neutres » possible, sans jugement. Attention au langage corporel qui trahit bien souvent nos pensées (yeux au ciel, haussement d’épaules, mimiques…). Trois attitudes sont à éviter à tout prix face aux difficultés alimentaires d’un enfant : le forçage alimentaire, les punitions et le chantage.
    Le forçage alimentaire est un acte très intrusif qu’il faut absolument proscrire qui consiste à introduire de force la nourriture dans la bouche du bébé ou de l’enfant. Cette attitude adoptée par les parents totalement désemparés face aux difficultés alimentaires de leurs enfant ne résout pourtant aucun problème.
    Les punitions et le chantage notamment affectif sont d’autres stratégies régulièrement mises en place pour inciter l’enfant à manger. Rarement payantes, ces stratégies sont à éviter, car le lien entre l’alimentation et le bébé où l’enfant doit se construire dans le plaisir et non dans la contrainte.
    Tout cela nécessite un changement de point de vue en profondeur du parent sur la façon de considérer son bébé ou son jeune enfant face aux difficultés alimentaires. Ce n’est pas qu’il ne veut pas manger, c’est qu’il n’y arrive pas. Le parent doit s’armer de patience, car il faut souvent plus d’une dizaine de présentations d’un aliment préalablement rejeté pour que celui-ci finisse par être accepté (et ce, même pour un enfant sans trouble alimentaire pédiatrique).
  • Occasionnellement, essayer de changer de cadre du repas et observer les réactions de l’enfant : dans un autre endroit (changement de pièce, pique-nique pris dehors…), auprès d’autres enfants ou d’autres adultes ou au contraire tout seul, loin des sollicitations de l’environnement habituel, avec d’autres types d’aliments que ceux qui lui sont en général proposés. Cela peut contribuer à briser le cercle vicieux du « repas catastrophe », le contexte dans lequel le repas est pris ayant son importance.
    Attention cependant, chez l’enfant présentant un trouble du spectre autistique, les changements de cadre peuvent être pour lui très compliqués à appréhender et doivent être par conséquent préparés en amont.

Comme tout apprentissage, il ne faut pas oublier que l’enfant apprend aussi en imitant ! Les parents, frères et soeurs ou accompagnants favorisent de fait l’instauration d’une ambiance chaleureuse en « montrant l’exemple ».

Si les repas sont source de tension au sein de la famille et de stress pour les parents, et ce, jusqu’à quatre fois par jour, parfois durant plusieurs mois voire plusieurs années, il n’est pas étonnant que l’ambiance associée à ces moments se soit détériorée et devienne délétère. Les quelques conseils donnés peuvent vous aider dans certaines situations, mais si les difficultés persistent, il faut en parler au médecin qui suit l’enfant pour être conseillé(e) et orienté(e) vers les professionnels de santé adéquats.

 


Couv_Troubles-alimentaires-pediatriquesWEB_0.jpgPour en savoir plus sur le développement de l’oralité alimentaire, le trouble alimentaire pédiatrique, les principaux professionnels de santé à dépister, à évaluer et à prendre en soin, les aides à l’hypersensibilité ou l’hyposensibilité sensorielle, etc. consultez le livre Troubles alimentaires pédiatriques : concrètement comment faire ?
Editions Tom Pousse, 2021

 

Retour aux articles de la rubrique « Alimentation »
Aller au contenu principal